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APIS
Parmi les innombrables animaux sacrés qui furent adorés, principalement
à basse époque, les plus célèbres, sont les taureaux qui
recevaient l'adoration dans les temples qui leur étaient consacrés. Ces
dieux-taureaux dont les incarnations successives symbolisaient
l'énergie créatrice de la nature sans cesse renouvelée, étaient la
représentation terrestre des dieux.
Apis est, sous le nom de « Boeuf Apis », le plus connu des animaux
divins. Très populaire et honoré dans toute l’Égypte, il était nourri
et adoré à Memphis, où on le nommait « Renouveau de vie de Ptah »,
comme taureau sacré de ce dieu dont on le considérait comme
l'incarnation. Ptah, enseignait-on, fécondait, sous la forme d'un feu
céleste, une génisse vierge et renaissait d'elle sous les apparences
d'un taureau noir que les prêtres savaient reconnaître à certaines
marques mystiques. Il devait avoir en effet sur le front un triangle
blanc, sur le dos la figure d'un vautour aux ailes éployées, sur le
flanc droit un croissant de lune, sur la langue l'image d'un scarabée
et, en outre, les poils de sa queue devaient être doubles.
Sa mère devait selon la légende avoir été fécondée par l'éclair, Ptah
en réalité, et une fois identifiée avec son veau sacré, elle faisait
également l'objet d'une vénération à Memphis où elle menait la vie de
rites et d'offrandes due à son rang de mère du dieu.
Tant qu'il vivait, Apis était délicatement nourri dans le temple que
les rois avaient fait construire à Memphis, vis-à-vis de celui de Ptah.
Chaque jour, à une certaine heure, on le laissait sortir dans la cour
attenante et le spectacle de ses ébats attirait de nombreux dévots et
beaucoup de curieux également, car la visite aux animaux sacrés était
une grande attraction pour les étrangers, si nombreux en Égypte à
l'époque gréco-romaine.
Chacun de ses mouvements était interprété comme une manifestation de
l'avenir et, lorsque mourut Germanicus, on ne manqua pas de rappeler
que le taureau, peu de temps auparavant, avait refusé de manger la
nourriture choisie que ce prince lui avait offerte.
Le plus souvent, on laissait mourir Apis de vieillesse ; Cependant s'il
dépassait un certain âge, on le noyait dans une fontaine, et il arriva
même que le taureau sacré périt assassiné.
De grandes manifestations de deuil se déroulaient à la mort d'un Apis
et les transports de joie accueillaient l'annonce qu'on venait de lui
découvrir un successeur. Dans les vastes souterrains découverts en
1850, à Saqqarah, dans la nécropole memphite, après de splendides
funérailles, on ensevelissait, au sein d'immenses sarcophages
monolithes de grès ou de granit rose, les cadavres momifiés des Apis.
Au-dessus de cet hypogée s'élevait pour le culte un grand temple, dont
il ne reste aujourd'hui plus rien, qu'on appelait en grec le Sérapeïon
et en latin le Sérapeum. C'est là qu'on rendait le culte funéraire au
taureau défunt, devenu, comme tous les morts, un Osiris et adoré sous
le nom d'Osiris Apis, en grec Osorapis, ce qui le fit identifier
rapidement avec le dieu étranger Sérapis, adoré selon un rite purement
grec dans le grand Sérapeum d'Alexandrie.